Manger à la cantine !

 

 

Passer une journée à l'école signifie pour un grand nombre d'élèves partager le repas avec ses camarades. En effet, les municipalités proposent un service de restauration dans de nombreuses écoles. 

Pourtant, pour certains élèves avec TSA, ce n'est pas si simple. Même si l’enseignant spécialisé, coordonnateur du dispositif ULIS n'a pas pour mission première d'intervenir sur la pause méridienne, force est de constater qu'il est souvent sollicité par les équipes.  Voici donc quelques partages d'expériences :

Dans notre dispositif ULIS- TSA école

Si certains élèves sont domiciliés proches de l'école et que les parents ont à cœur de venir les chercher pour la pause déjeuner, ce n'est pas  toujours possible . Certaines familles vivent loin de l'école où se trouve le dispositif, les parents travaillent ce qui nécessite comme pour tout élève une prise en charge sur le temps de pause méridienne.  La pause méridienne est un temps périscolaire souvent long et agité pour tous les enfants mais peut l'être encore davantage pour des élèves avec un TSA. Certains parents au vu des difficultés alimentaires ou comportementales s'autocensurent et ne souhaitent pas que leurs enfants mangent à la cantine.

Pourtant, ce temps de repas est un moment important tant au niveau social qu'au niveau de la santé. L'enfant, l’adolescent puis l'adulte TSA mangera toute sa vie, il nous a donc semblé important de réfléchir à ce moment. C'est pourquoi après avoir échangé avec les familles, nous avons pu identifier les spécificités et les besoins des enfants pour le repas. Nous avons ensuite cherché ensemble (avec l'aide de certains partenaires) des solutions pour que ce temps de repas et de pause se passe le mieux possible pour tous. Rendre ces temps fonctionnels, gagner en autonomie pour éviter la stigmatisation et les problèmes de santé.

Notre démarche :

Accueillir - Écouter - Échanger - Identifier les besoins - Chercher des solutions - Mettre en œuvre -  Réguler

 

• Voici quelques exemples de besoins identifiés :

Difficultés praxiques / fonctions exécutives

Pour l'un d'entre eux  des difficultés à couper et à organiser ses mouvements

Difficultés à s'organiser pour le passage au self (difficultés à planifier  et à enchainer les différentes actions)

Besoin d'une ritualisation importantes (intolérance aux changements, manque de flexibilité, besoin d'être rassuré)

Difficultés comportementales

Ne pas attendre son tour pour le service occasionnant des crises et des ruades vers la porte du réfectoire et des gestes non adaptés envers les camarades.

Manger trop et trop vite : se jeter sur la nourriture, gober sans mâcher et crier quand l'assiette est vide/ aller chiper des aliments dans l'assiette d'un camarade.

Manger toujours la même chose : refus de manger la nourriture de la cantine

Nécessité d'une présentation particulière des aliments : Ne pas mélanger les aliments et les aligner.

Difficultés sensorielles

Odeurs, textures (mélange de textures), goût, couleurs... avec une hyper sélectivité (un élève ne pouvait manger que des nuggets d'une certaine marque)

Sensibilité à l'agitation, aux lumières et aux bruits

Ne pas avoir le ressenti de la satiété et ne pas pouvoir s'arrêter de manger, ce qui entraine un surpoids important

Difficultés de communication

Absence de moyen de communication (pas ou peu de langage oral / pas de CAA mise en place)

Besoin d'explicitation et de formulations claires

 

Spécificités orales (troubles de l'oralité)

Difficultés à mastiquer,  à déglutir

Il ne s’agit pas de "normer" l'alimentation mais de trouver un équilibre permettant de respecter les besoins de chacun tout en rendant ce temps plus fonctionnel et permettre à chaque enfant de gagner en autonomie.

 Certaines spécificités peuvent être importantes et engendrer des troubles (dénutrition, carences, troubles du comportement, obésité sous alimentation ...). Cela  relève d'un suivi médical ou paramédical. Médecin, service spécialisé, nutritionniste, ergothérapeutes et orthophonistes peuvent aider l'enfant et sa famille.

 article ici

Il a été également nécessaire de réfléchir en équipe aux activités à proposer aux élèves avant et après le repas. En général, la pause méridienne dure entre 1h30 et 2h. Cette réflexion a concerné tous les élèves avec ou sans TSA.

•  Voici quelques exemples de solutions mises en oeuvre

Informer et sensibiliser les personnels mais aussi les camarades

Animateur de cantine

AESH

Agents municipaux (ATSEM / agent de cantine au self)

Camarades de classe

Un temps a été pris pour présenter les besoins des élèves et faciliter leur accompagnement. Ces informations ont été mises en lien avec les spécificités des personnes avec TSA. Il a s'agit d'expliquer notamment les spécificités de comportement, de communication et sensorielles des élèves. Indiquer comment communiquer et interagir avec eux. Préciser, quand nous en avions connaissance les stratégies d'apaisement en cas de crise.

Ma présence et celle de l'AESH -co ont été importantes en début d'année pour également donner les informations ou éléments de compréhension en direct dans les situations vécues. Nous n'avons pas compté nos heures ... des journées pratiquement sans pause ! Il s'agissait d'observer, d'accompagner et de donner du sens aux situations pour envisager l'accompagnement et les aménagements.

Le SESSAD aurait à mon avis dû tenir ce rôle mais cela n'a pas été le cas à notre grande déception.

 Déployer des moyens humains supplémentaires

Animateur

Le projet d'ouverture d'un dispositif ULIS TSA a été construit en partenariat avec la municipalité. Une attention particulière a été portée au temps de pause méridienne. En maternelle, un animateur supplémentaire a été nommé pour le groupe. Ainsi, il y avait possibilité d'apporter une aide plus importante si nécessaire sans pour autant être toujours auprès de l'enfant

AVS (à l'époque)/ AESH

 Dans le cadre du PPS, il peut être indiqué que l'enfant a besoin d'un accompagnement humain sur la pause méridienne. La mairie a embauché sur le temps de cantine plusieurs des AESH de l'école.

L'entraide entre les élèves a été importante également. Les grands de cycle 3 ont notamment accompagné les élèves de Cycle 2 et parfois de cycle 1 (notre ULIS étant implantée dans une école primaire)

cependant, la compensation par l'accompagnement humain ne doit pas se faire au détriment d'un réel apprentissage ou de prises en charge adaptées.

 L'échange avec la famille et les partenaires

Lors de l'entretien de pré-rentrée, certaines questions ont été posées à la famille article ici puis complétées via un questionnaire plus précis pour les élèves mangeant à la cantine.

certaines familles n'avaient pas pris conscience que la question de l'alimentation pouvait être abordée par des partenaires de soin. Pour une famille, la mise en relation avec le médecin traitant puis un orthophoniste spécialisé et un nutritionniste a permis de repenser les repas pour toute la famille ainsi que les comportements à table. Cela a été très bénéfique pour le jeune mais aussi ses parents qui ont pu avoir des repas plus apaisés:

Régime alimentaire diversifié

Manger ensemble

Manger à table

Manger avec des couverts

Tout ce travail a été mené en complément de notre action à l'école. Nous avons tous travaillé en concertation.

 Comme j'ai l'habitude de l'écrire, rien de magique mais une analyse pointue des situations, du temps et du travail.

 

Mise en place d'outils visuels

Pour expliquer le déroulement des actions et leur enchainement

Pour expliquer les règles de fonctionnement du self

Pour cadrer la prise de nourriture

Voici un exemple de visuels créé pour un de nos élèves.

L'assiette est plastifiée, les étiquettes " aliments" découpées et plastifiées et au verso on place un velcro . Suivant le menu, Y place les étiquettes dans l'assiette.  Quand il mange l'aliment pour de vrai, il enlève les étiquettes et les places dans la pochette "fini" . Ainsi il voit ce qu'il peut manger au fur et à mesure. De plus la manipulation des étiquettes ralentit son rythme.

On lui a aussi appris à mastiquer plus longtemps et à trouver des alternatives lorsqu'il est énervé. La communication a été améliorée et les crises ont diminué.

 

 

 

 

En ce qui concerne le temps d'attente au self, Y mangeait en premier au début de l'année puis petit à petit, avec un outil visuel simple ou apparaissait l'ordre de passage avec sa photo, nous avons estompé pour arriver après pluseurs mois à faire en sorte que Y mange en même temps que les élèves de sa classe.

 

Un exemple de visualisation des différentes actions pour R

 

Prise en compte des spécificités sensorielles et alimentaires

              Aménager l'environnement

Nous avions la chance dans l'école d'avoir une petite salle de repas pour les enseignants contigue à celle des élèves. cette salle n'étant pas utilisée, dans un premier temps, nous avons privilégié ce lieu plus calme pour y faire manger les élèves TSA avec certains camarades calmes également.

La possibilité d'avoir des cloisons et/ou  le port du casque peuvent être envisagées si besoin.

Éteindre les lumières si besoin

               Le PAI /le PPS

Parfois, il reste indispensable de maintenir un régime particulier.

En effet, le trouble peut être trop complexe à gérer en collectivité ou l'apprentissage concernant cette thématique n'est pas une priorité et risque de mettre en insécurité le jeune ou le fatiguer inutilement. Dans certains cas, les informations sont inscrites dans le PPS ou dans le document GEVA-SCO. D'autres fois, il sera utile de faire un PAI. Lien ici PAI qu'est-ce que c'est ?

Dans le dispositif, nous avions un élève qui ne supportait pas le mélange des textures et ne voulait manger que ce que sa maman lui préparait. Nous avons donc opté pour cette formule et la famille a apporté le panier repas. Les repas s'en sont trouvés apaisés et la suite des cours également.

 

Des temps d'apprentissages sur l'alimentation dans le cadre des programmes scolaires en collaboration avec les enseignants des classes des élèves

Albums /documentaires/ imagiers ( dessins et photos) sur la cantine  ou l'alimentation (à adapter à l'age des élèves).

Voici quelques ouvrages

Lien vers le descriptif de l'ouvrage ICI

 

 

Il existe de nombreux albums parlant de nourriture

Quel radis dis-donc, La soupe aux cailloux, le géant de Zéralda , de nombreux contes ..

N'hésitez pas à proposer des titres en commentaires !

 

Travail sur les différents aliments via des jeux de carte, de lotos, jeux de catégorisation ou de manipulation (dinette, puzzles..)

....

 

 

 

Travail sur le goût et les odeurs   : ateliers cuisine , jeux de kim, loto des odeurs ...

 

 Aménager le temps Avant ou après le repas

Dans l'école qui était vaste et avait beaucoup de classes (18) , le temps de pause méridienne a toujours été un sujet de débat avec l'équipe. L'importance que chaque enfant puisse bénéficier d'un temps de jeu mais aussi de repos nous a conduit à proposer diverses activités pour tous les élèves.

 Jeux libres dans la cour

Jeux de construction / jeux de voitures ... dans la cour

jeu de société

Lecture

Repos en salle

 Pour les élèves avec TSA, un visuel ( je ne l'ai pas gardé malheureusement) fonctionnait comme un tableau de choix. L'enfant plaçait l'étiquette correspondant à l'activité choisie.

 

 J'espère que cet article vous donnera quelques idées pour répondre aux besoins de vos élèves que vous soyez enseignant en dispositif ULIS ou pas. La démarche est la même.

A+